Avril 2022
La plateforme RH Jura vous aide à appréhender cette thématique très sensible dans le monde économique en ébullition.

La plateforme RH Jura vous aide à appréhender cette thématique très sensible dans le monde économique en ébullition.

Depuis quelques années, l’APEC Bourgogne Franche Comté constate que nous sommes rentrés dans ce qu’elle qualifie comme un monde VUCA, c’est-à-dire un monde caractérisé par la volatilité, les incertitudes, la complexité toujours et partout, et les ambiguïtés parfois (Volatility, Uncertainty, Complexity and Ambiguity). Les enjeux pour les entreprises s’en trouvent fortement impactés :  il y a une nette mutation des comportements et des attentes chez les candidats, les entreprises entrent dans des phases de transformation, avec une relation au travail en ébullition chez ses salarié.e.s, qui s’est clairement amplifiée depuis la crise sanitaire, nous dit Jean Marc DARRAGON de l’APEC.

Avec la reprise et les besoins nombreux dans beaucoup de filières, les entreprises sont confrontées à des difficultés de recrutement. Ces difficultés peuvent être liées à plusieurs facteurs qui peuvent même se cumuler. Cela peut être lié à des difficultés structurelles pour certains métiers (informatique, bâtiment, hôtellerie restauration tourisme, agriculture, …), ou lié à la localisation géographique (territoire rural, enclavé, frontalier touristique…), parfois aussi lié à un manque d’attractivité constatée de certains secteurs d’activités (industrie, BTP, …). La taille des entreprises peut aussi impacter car des pratiques RH associées très différentes ; dans certains cas les entrepreneur.se.s sont amenés à tout gérer tout.e seul.e : le social, le recrutement, les réseaux sociaux, la politique salariale de l’entreprise, … Et enfin, cela peut venir des nouvelles exigences formulées par les candidats (télétravail par exemple, non travail du week-end, amplitudes horaires et compatibilité vie de famille, …).

Jean Marc DARRAGON de l’APEC constate que les nouvelles attentes des salariés ne sont plus uniquement en corrélation avec l’âge et que depuis cette crise sanitaire nous retrouvons de façon plus intense les critères suivants : la notion de sens, d’utilité, de pouvoir choisir la façon de travailler (bénéficier du télétravail, souplesse …). Par conséquent, les entreprises ont la nécessité de développer leur marque employeur et leur attractivité pour attirer de nouveaux talents sans négliger les salariés présents dans l’entreprise.

Pour cela, il est important pour une entreprise de se pencher sur ces 4 items :

  • Quelle est ma promesse employeur ? (ADN de l’entreprise, sa raison d’être, ses succès, ses particularités mais aussi une communication sur les chantiers RH tels que les engagements de l’entreprise en matière d’égalité femme/homme, diversité… sans oublier la QVT (qualité de vie au travail), l’articulation vie pro/vie perso et le cadre de vie)
  • Quelle est mon expérience candidat ? (permettre à un candidat de se projeter dans l’entreprise même avant d’y être, l’informer sur le processus de recrutement, l’intégration…)
  • Quelle est mon degré de connaissance de ma e-réputation ? (suis-je noté ? , sur quels sites ?…)
  • Que font mes confrères ou mes concurrents pour attirer des talents ?

Attention, dans cet environnement compliqué et observé en matière de recrutement, l’erreur serait de survendre son entreprise pour attirer davantage. Il est important d’être sincère, transparent et authentique.

Jean Marc DARRAGON pense, entre-autre à une entreprise industrielle du nord de la Franche Comté qu’il a accompagnée récemment avec un diagnostic « marque Employeur » : celle-ci n’avait pas besoin auparavant de communiquer pour recruter et attirer des candidats, aujourd’hui, c’est une nécessité pour elle d’établir une stratégie de communication RH. Quels canaux utiliser et quels types de réseaux sociaux ? quels messages auprès de quelles cibles ?

Selon le niveau des tensions et des difficultés de recrutement, il peut parfois y a avoir un changement ou une inversion de paradigme : le candidat est devenu un client !

Ce qui est certain aujourd’hui, c’est que dans ces cas, l’entreprise doit mettre en place la même exigence dans sa communication envers les candidats que pour ses clients, la même attention. C’est un véritable changement de posture, dans un marché concurrentiel sur l’emploi ce sont plutôt les candidats qui choisissent une entreprise et non les entreprises qui choisissent un candidat !

En conclusion, construire sa marque employeur n’est pas un luxe : comment par se poser des questions et avoir conscience de sa marque employeur parait déjà une première nécessité ; y travailler, et ensuite emmener votre marque employeur vers un espace mûrement choisit est sans aucun doute l’étape qui suit !

Cela peut être une piste pour faire face à des problèmes de pénurie de candidats sur certains métiers ou bassin d’emploi, et pouvoir les dépasser.

Espace compétences digitales – CCI

A l’occasion d’un premier webschool organisé sur le thème des réseaux sociaux et des RH, il était ressorti des participants des problèmes de recrutement et l’image de l’entreprise.

L’Espace compétences digitales de la CCI a donc programmé un sujet qui était nouveau pour elle : la marque employeur. La réponse était là : 24 entreprises y ont participé ! « On pense souvent à pousser les produits et les services de l’entreprise, mais on oublie dans sa communication de parler du cadre de travail, des valeurs qui sont portées là. Or cela compte aujourd’hui. Cela est vrai pour les candidats qui ont envie d’être bien au travail. Mais cela peut aussi faire la différence pour le client : si une entreprise fait la différence humainement, sur l’environnement, cela peut faire la différence dans l’achat ».

Domaine Désiré Petit à Pupillin

Anne Laure co dirige le Domaine viticole Désiré Petit de Pupillin (27 ha en reconversion bio).

Le Domaine emploie 4 personnes à temps plein et une personne à presque mi-temps à la vigne. Le Domaine s’est clairement ouvert à des jeunes stagiaires et apprentis, c’est important pour nous, pour garder l’échange.

Le Domaine n’a pas réfléchi sa marque employeur, pas dans ces termes, mais il sent bien que les candidats sont informés : « ils choisissent de postuler chez nous, on voit bien qu’ils ont consulté, ils savent qui nous sommes ». Le Domaine sait ce dont il a besoin lui pour que cela marche : par exemple, la taille de la vigne cela dure un long moment, dans les rangs par tous temps, il faut pouvoir se parler, échanger. Mais le Domaine a aussi compris que les salariés venaient chercher chez eux de l’expérience, un salaire c’est sûr, mais aussi pour beaucoup, d’être bien, se sentir bien, être considéré, écouté, pouvoir participer et donner son point de vue. Faire confiance, donner des responsabilités, écouter et faire participer, on voit bien que cela transpire dans les entretiens annuels comme quelque chose qui est apprécié.

Le Domaine n’a pas toujours fait ainsi, la manière de faire aujourd’hui est issue d’un cheminement nous dit Anne Laure Petit : il y a 8 ans, nous considérions qu’il était bien d’arriver avec un bagage, il y a 5 ans, on aimait qu’il vienne du métier, et maintenant, si la personne a un simple diplôme mais qu’elle est curieuse et a envie d’apprendre c’est même mieux que quelqu’un bardé de certitudes ! Et il faut s’attendre à ce que la personne ait aussi parfois d’autres projets, au Domaine de s’organiser en fonction : nous déposons l’offre plusieurs mois en amont maintenant, il n’est pas rare que la personne nous dise qu’elle s’est engagée par ailleurs pour quelques semaines ou mois et arrive ensuite. A l’inverse, si elle s’annonce disponible de suite, à nous de bien réfléchir si nous ne démarrons pas tout de suite finalement.

 

V33 Bruno Caron, Directeur des ressources humaines

Petite présentation de l’entreprise et du contexte emploi

V33 un un groupe familial français, basé et né à Domblans dans le Jura en 1957. Nous concevons et vendons de la peinture et des produits pour le bois sous plusieurs marques : V33, Liberon, Hypnotik, Cecil Professionel et Plastor. Nous employons entre 700 et 750 personnes selon la saison, dont une centaine de personnes à l’international.

Notre groupe continue son développement et nous nous inscrivons dans le développement durable par le déploiement de notre politique RSE (Responsabilité Sociétale de l’Entreprise).

Un de nos enjeux est d’attirer de nouveaux talents, ce qui est un challenge compte tenu de la situation de plein emploi du Jura.

Quelles étaient les pratiques recrutement et marque employeur ? 

Il y a 5 ans, nos pratiques de recrutement étaient plus « traditionnelles » : nous comptions essentiellement sur les agences d’intérim pour le court terme, et sur des cabinets de recrutement pour les postes en CDI.

Concernant la marque employeur, elle n’était pas vraiment au coeur de nos préoccupations : nous avons toujours su communiquer sur nos produits mais nous étions moins attachés à la communication de marque que ce soit pour créer une marque forte ou pour développer notre attractivité via la marque employeur.

Que faites-vous en termes de marque employeur et pourquoi ? 

Aujourd’hui, les mentalités au travail ont changé : un candidat dans sa recherche d’opportunités, va prendre en considération le poste que propose l’entreprise, la rémunération proposée, comme par le passé, mais ce qui est nouveau, c’est également une recherche de sens qui passe notamment par les valeurs affichées et pratiquées par l’entreprise. De par cette recherche de sens, l’entreprise doit communiquer et prendre conscience de l’image de marque employeur qu’elle renvoie. V33 est une entreprise attachante, une grande famille où règnent professionnalisme et bienveillance, nos collaborateurs sont fiers d’être V33, et cela, il ne faut pas le cacher il est fondamental de l’afficher.

Que faites-vous en termes de fidélisation de collaborateurs ? 

Nous attachons une attention particulière à la sécurité, à l’ambiance de travail et à la Qualité de Vie au Travail (QVT). La sécurité, c’est la priorité avant tout autre chose. Quand on dit sécurité, on pense avant tout à la prévention des accidents du travail, c’est vrai, et nous nous sommes engagés dans une démarche de prévention ambitieuse depuis 2017 pour améliorer notre culture sécurité. Mais la sécurité, ce sont aussi toutes les mesures sanitaires qui ont été mises en place pour protéger nos collègues pendant cette période de crise sanitaire. Notre récompense, c’est d’entendre nos salariés dire qu’ils estiment que l’entreprise a été au-delà de ses obligations et qu’ils se sentent en sécurité chez V33.

Concernant la QVT, notre démarche RSE est garante d’une politique d’amélioration continue dans ce domaine. De nombreux projets ont été menés en ce sens : charte de don de congés, amélioration de la mutuelle, mise en place d’une terrasse dans les espaces verts pour permettre les pauses et la prise de repas à l’extérieur aux beaux jours, mise en place d’une charte de télétravail dès 2019, amélioration de la cantine pour créer une atmosphère « bistrot ». 

Cela passe aussi par la reconnaissance de la contribution des salariés aux bons résultats de l’entreprise, bien évidemment par les dispositifs de participation ou d’intéressement, mais aussi par le versement de plusieurs primes exceptionnelles liées aux efforts consentis pendant la crise sanitaire.

Enfin, ce qui est fondamental, c’est de partager notre vision du développement de l’entreprise. La communication interne a été fondamentale pendant les deux dernières années, et Marie de Grivel, notre Directrice Générale, a tenu à garder le contact avec chacun de nos collaborateurs, notamment pendant la période de fermeture de l’entreprise en mars-avril 2020, afin de rassurer et de partager notre vision de la situation. C’est en partageant notre vision avec l’ensemble de l’entreprise que nous pouvons obtenir l’adhésion de l’équipe, et une équipe qui sait où elle va est bien plus efficace. L’avantage de communiquer sur notre vision du développement de l’entreprise est également que cela répond à cette quête du sens que j’évoquais précédemment.

J’ajouterais également que le Groupe V33 est un groupe dynamique, qui sait mener différents projets simultanément et qui est une entreprise stimulante pour les « jeunes » générations : le renouveau est partout.

Quels sont vos projets pour demain pour aller encore plus loin ?

Ce qui est important au final, c’est que notre message soit le reflet de nos actes. Nous avons pris conscience de l’impact de notre entreprise sur l’économie locale, et nous avons à cœur d’avoir un impact positif sur celle-ci. Nous développons des partenariats en local, avec des associations de réinsertion, nous travaillons avec Pôle Emploi sur des campagnes de recrutement par simulation (MRS). La MRS est une méthode de recrutement où les diplômes et le parcours professionnel ne sont pas pris en considération, seules les habiletés, mesurées par Pôle Emploi et la motivation, évaluée lors d’un entretien permettent d’accéder au poste. Tout cela s’inscrit dans une politique d’entreprise de diversité : ce qui fait la richesse d’une entreprise, c’est sa diversité. V33 affiche aujourd’hui un index d’égalité professionnelle de 98/100, la proportion de femmes et d’hommes est voisine de 50/50 et nous allons continuer à travailler en ce sens.

Que voyez-vous comme avantages et inconvénients de travailler les sujets de marque employeur et fidélisation ?

Nous ne voyons que des avantages à travailler sur ces sujets, car cela entre dans une stratégie d’amélioration continue, d’adaptation de l’entreprise à son environnement et cela a également un impact positif sur l’ambiance au travail. Bien sûr, il faut accompagner le changement, et lever quelques freins, mais une entreprise doit se tourner vers l’avenir et anticiper les changements.

Quels conseils donneriez-vous aux entreprises qui ne travaillent pas encore ces sujets ?

Il est urgent de prendre en considération ces sujets, car le marché de l’emploi risque de devenir de plus en plus d’être difficile pour les recruteurs. Un candidat peut maintenant se permettre de choisir son entreprise en fonction de ses propres aspirations. Ne pas prendre en considération ces sujets, c’est s’exposer à des difficultés de recrutement, et risquer de voir partir ses talents. Plus que jamais, l’entreprise doit prendre en considération le facteur humain, sous peine de perdre son attractivité, et à terme sa compétitivité.